Les Changos : Un peuple de marins méconnu

Ces nomades occupaient le Nord du Chili au IXeme siècle.

Les Changos sont un peuple autochtone du Chili, ayant habité les côtes du nord du pays, principalement entre les régions d’Atacama et d’Antofagasta, sur environ 1 000 km de littoral. Pendant plus de 2 000 ans, ils ont développé une culture maritime exceptionnelle. Leur reconnaissance officielle en tant que peuple autochtone par l’État chilien en 2020 a permis de mettre en lumière un riche héritage, notamment leurs techniques avancées de pêche, de navigation et d’artisanat.

Origines et Histoire

Les Changos vivaient sur la côte aride du Pacifique bien avant l’arrivée des colonisateurs européens. Des fouilles archéologiques ont révélé des traces de leur présence remontant à plus de 3 500 ans. Leur mode de vie était centré autour de la mer, exploitant les ressources naturelles marines dans un environnement côtier hostile.

Pendant la colonisation espagnole, leur mode de vie a été affecté, mais à la différence des Mapuches, les Changos n’ont pas été engagés dans de grands conflits militaires. Beaucoup d’entre eux ont été assimilés dans les colonies côtières chiliennes ou ont été marginalisés à la suite de la modernisation du pays.

Techniques de Pêche

La pêche était au cœur de la vie chango. Leurs principales techniques incluaient :

1. Pêche à la ligne et au harpon : Les Changos utilisaient des lignes de pêche fabriquées à partir de tendons d’animaux et d’autres fibres naturelles. Ils employaient aussi des harpons pour capturer des poissons plus gros comme le requin, le thon ou l’espadon.

2. Pêche aux filets : Des filets rudimentaires étaient confectionnés à partir de fibres végétales et servaient à capturer des poissons en grande quantité, tels que le maquereau et la sardine. Ces filets étaient souvent jetés à partir de la plage ou depuis leurs embarcations.

3. Chasse aux mammifères marins : Une pratique essentielle pour leur subsistance était la chasse aux lions de mer et aux phoques. Ces animaux fournissaient non seulement de la nourriture, mais aussi des matériaux essentiels pour leur artisanat (peaux, os, graisse). Des radeaux étaient utilisés pour approcher les animaux sur des îles ou des rochers isolés.

Techniques de Navigation

Les Changos étaient des navigateurs experts malgré les conditions difficiles de l’océan Pacifique au large du Chili. Ils utilisaient principalement deux types d’embarcations :

1. Radeaux en bois : Confectionnés à partir de troncs de bois flotté, ces radeaux servaient pour la pêche côtière et les déplacements le long du littoral. Ils étaient manœuvrés à l’aide de rames simples.

2. Embarcations en peau de phoques : Une technique plus sophistiquée impliquait l’utilisation de peaux de phoques gonflées, cousues ensemble et fixées à un cadre en bois. Ces embarcations légères et robustes étaient particulièrement efficaces pour la chasse en mer et permettaient aux Changos de naviguer sur de plus longues distances, y compris pour rejoindre des îles au large. Cette technique a été adaptée par d’autres peuples maritimes de la région, mais les Changos en ont fait une spécialité.

Artisanat et Culture Matérielle

Les Changos excellaient dans l’artisanat lié à leur environnement côtier. Parmi les objets qu’ils fabriquaient :

1. Outillage en os : Les Changos utilisaient les os de phoques et de lions de mer pour confectionner divers outils, notamment des aiguilles pour coudre les peaux et des harpons pour la pêche.

2. Vêtements en cuir : Les peaux de phoques et de lions de mer servaient à fabriquer des vêtements et des abris. Leurs techniques de tannage permettaient de rendre ces matériaux résistants aux intempéries.

3. Poterie et récipients en coquillages : Bien que la poterie ne soit pas leur art majeur, les Changos fabriquaient des récipients utilitaires à partir de coquillages et de matériaux naturels, adaptés à leur style de vie nomade.

 

 

Données Démographiques

Avant la colonisation européenne, il est estimé que les Changos comptaient plusieurs milliers d’individus répartis le long des côtes. Avec l’arrivée des Espagnols et les changements économiques et sociaux qui ont suivi, leur nombre a drastiquement chuté. Aujourd’hui, il est difficile d’estimer leur population, car de nombreux Changos ont été assimilés à la population métisse chilienne. Néanmoins, selon les données de recensement de 2021, près de 4 500 personnes s’identifient comme descendants de Changos.

Spiritualité et Croyances

Les Changos avaient un lien profond avec la mer, qu’ils considéraient comme un être vivant et puissant. Les éléments marins, tels que les vagues, les tempêtes et les animaux marins, faisaient partie intégrante de leur cosmogonie. Les rites et cérémonies religieuses étaient souvent liés à la mer et aux cycles de la nature, et servaient à garantir la protection des pêcheurs et la prospérité des ressources marines.

Relations avec les Autres Peuples

Bien qu’isolés le long de la côte, les Changos entretenaient des relations commerciales avec les peuples de l’intérieur des terres, notamment les Atacamas, avec qui ils échangeaient des produits marins contre des denrées agricoles. Ces échanges témoignent d’une interdépendance entre les habitants des montagnes et ceux de la côte.

Avec l’arrivée des Espagnols, les Changos ont été de plus en plus marginalisés et intégrés à la société chilienne métisse, perdant peu à peu leurs traditions. Cependant, leur culture a laissé une empreinte durable dans certaines pratiques de pêche artisanale qui se perpétuent encore aujourd’hui le long des côtes chiliennes.

Situation Actuelle et Revitalisation Culturelle

Avec la reconnaissance officielle en 2020, des efforts sont en cours pour revitaliser la culture chango. Des initiatives locales visent à préserver et promouvoir leur patrimoine, notamment à travers des programmes éducatifs, des festivals culturels et des projets de protection des sites archéologiques.

L’impact de cette reconnaissance est crucial, car il permet aux descendants des Changos de revendiquer un espace dans l’histoire et la société chilienne contemporaine. Cette reconnaissance pave également la voie pour la réhabilitation de leurs pratiques traditionnelles, notamment la pêche artisanale, qui continue de jouer un rôle important dans certaines communautés côtières.